Stupeur et aboiements
Crier, grogner, aboyer, hurler… Toutes sortes de sons et de vocalises qui sont autant de moyens d’expression. Un vaste répertoire acoustique, un monde sonore souvent associé aux langages du corps, qui révèle de manière subtile l’état émotionnel de votre chien.
Chez les loups, chaque individu possède son propre timbre de voix, toujours reconnaissable par un autre.
Aboiement de loup…
Les aboiements sont peu fréquents. Rauques et brefs, ils sont le plus souvent la ponctuation finale d’un hurlement, et servent à dissuader un intrus de s’approcher de leur tanière. Signal d’alerte en présence d’un danger, ils déclenchent une réaction immédiate chez les louveteaux d’une part, qui se réfugient dans la tanière, et chez les adultes d’autre part, qui se rassemblent et cherchent à découvrir l’objet de l’alerte. Quand celui-ci se révèle finalement sans danger, chacun reprend ses activités, mais si la menace se précise, les loups choisissent de fuir ou d’attaquer.
…et aboiements de chien
Si les loups aboient rarement et pas plus d’une ou deux fois, les chiens aboient de manière répétée. Une cascade sonore à laquelle tous les chiens du voisinage vont répondre. Les causes aussi sont différentes de celles qui motivent le loup. C’est ici la sélection qui a favorisé les chiens les plus aboyeurs, capables de monter la garde pour leurs maîtres humains. Mais si nos chiens aboient davantage, c’est également parce qu’ils ne peuvent réagir comme le feraient des loups à l’état sauvage. Leur environnement est différent. Ils ne peuvent souvent ni fuir ni attaquer en réponse à une menace. C’est pourquoi ils aboient.
Aboyer est plus fréquemment un signe de peur que d’agressivité. Un chien réellement agressif n’aboiera que brièvement, en guise d’avertissement, avant de vous attaquer. Tandis que l’animal redoublant de voix remplace l’attaque par un surcroît de sons. Il sera donc bien moins dangereux qu’un chien silencieux, contrairement à ce qu’on aurait tendance à croire.
Hurlements
Dans le monde sonore du loup, le hurlement est utilisé dans plusieurs circonstances : le salut, le rassemblement de la meute, la recherche d’un partenaire, le rappel d’un louveteau trop éloigné de la tanière, l’inquiétude face à un danger, le marquage du territoire, la défense d’une proie, ou simplement…pour le plaisir !
Les chiens, qui aboient plus, hurlent en revanche beaucoup moins que leurs cousins sauvages. Difficile d’expliquer la signification du hurlement chez le chien domestique. Marque acoustique du territoire ? Langage spécifique et nouvelle facette de la communication entre congénères ? Facteur de cohésion d’un groupe ? On sait qu’il possède sans conteste la faculté de resserrer les liens dans les meutes de loups. Mais il perd un peu de cette fonction primitive pour nos chiens dont les modes de communication avec leurs meutes humaines sont différents.
Seuls quelques chiens se mettent parfois à hurler, manifestant leur joie ou répondant à une « invite » de leur famille : cris d’enfants, instrument de musique, mélodie aux accents aigus. Isolé, enfermé dans la maison ou dans un chenil, un chien peut aussi hurler pour appeler d’autres chiens à son secours, afin qu’ils connaissent son infortune, son ennui, et viennent le délivrer… Votre chien peut donc hurler dans deux situations opposées : quand il est très entouré, ou, au contraire, quand il se sent très seul.
Jappements, grondements et gémissements
Le jappement est une marque d’amitié qui accompagne une démonstration plus physique faite de bonds, de mouvements de la tête et de roulades sur le dos. Japper, chez le chien comme chez le loup, s’inscrit dans le rituel de l’invite au jeu. En fonction du ton, de l’intensité et de la modulation, le grondement traduit quant à lui toutes les nuances de l’agressivité ; du simple agacement à la fureur déclarée. Il ne fait pas bon, pour un homme ou un chien qui entend un tel grondement, de s’attarder sur les lieux et d’insister davantage.
Les gémissements sont longtemps restés ignorés parce qu’à peine audibles. Leur signification n’est pas, comme on l’imagine en se basant sur nos propres comportements, une plainte exprimant la tristesse mais un salut amical ou un signe de soumission.
Un aboiement de peur, un hurlement de joie, un jappement d’amitié ou un grondement de colère…Tout un univers sonore qu’il convient d’écouter avec attention pour mieux comprendre votre chien et ce qu’il cherche à vous dire, en vous« parlant » avec ses propres mots, avec ses propres sons.
Julie Delfour (texte et illustration)
Chiens 2000, n°302
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- « Des chiens tout feu, tout flammes – L’unité cynotechnique des pompiers de Paris », Chiens 2000, novembre 2002.